Il est 3h26. Une lampe de chevet lutte contre la nuit. L’écran reste noir, la messagerie vocale clignote. Tu ne l’as pas rappelé. Mais quelque chose te rappelle. C’est là, précisément là, que résonne Love U This Late, le nouveau morceau d’Anjalts, et qu’il te prend par le col de l’âme.
Dès les premières secondes, la voix d’Anjalts arrive sans prévenir. Pas comme une démonstration, mais comme une présence. Elle ne chante pas, elle s’adresse à vous. Intimement. Comme si vous étiez dans la pièce, comme si vous veniez d’ouvrir la porte d’une chambre à 3h27 du matin, lampe tamisée, pluie fine sur les vitres, et cette voix qui parle à quelqu’un qui n’est plus là. Ou qui ne l’a jamais vraiment été.
Musicalement, Love U This Late s’inscrit dans une tradition minimale, presque chuchotée. Un mélange feutré de chill pop, de soul ambient, de folk synthétique, qui évoque les balades les plus dépouillées de London Grammar, l’élégance pudique d’un Rhye, ou encore l’épure sensorielle de FKA Twigs dans ses instants de suspension. Les percussions sont comme des battements de cœur ralentis, des touches à peine effleurées. Le piano, parfois, se dérobe sous les doigts. Tout est fait pour laisser de l’air. Pour respirer.
Mais ce n’est pas une chanson d’amour. C’est une chanson après l’amour. Quand les choses ont été dites trop tard, ou jamais vraiment. Quand on se rend compte que ce qu’on cherchait à réparer n’avait peut-être jamais été brisé, mais seulement ignoré. Et c’est là que réside la force de cette composition : dans sa capacité à nous faire sentir ce que d’autres auraient mis des pages à écrire.
Anjalts, entièrement aux commandes – écriture, composition, production – signe ici un morceau-réflexion. Un morceau-réveil. Il y a dans cette production une sobriété mystique, un refus de l’esbroufe, une volonté de laisser les mots respirer, de laisser le vide exister. On dirait que la musique elle-même hésite à combler les silences, comme si elle savait que c’est là que se cache le vrai propos.
Et ce propos, c’est l’absence. L’absence de l’autre. L’absence de soi-même. L’absence de réponse. “Love U This Late” aurait pu être une chanson de rupture, mais c’est bien plus que ça. C’est une lettre que l’on n’envoie jamais, une parole qu’on garde pour soi mais qu’on couche sur une ligne mélodique en espérant que quelqu’un, quelque part, saura la lire.
Le morceau semble composé en apesanteur. Les couches sonores sont tenues comme des voiles, jamais pesantes, toujours prêtes à s’évaporer. Et la voix d’Anjalts, aérienne, parfois à peine articulée, semble flotter au-dessus du morceau comme une pensée qu’on n’arrive pas à formuler. Il y a une fragilité assumée ici, un courage de ne pas surproduire, de ne pas surécrire, de laisser l’instant parler pour lui-même.
C’est peut-être cela, au fond, qui touche le plus : cette capacité à dire sans imposer, à ressentir sans expliquer, à chanter comme on respire après avoir pleuré. Love U This Late n’est pas un tube. C’est une alcôve. Un morceau pour les heures floues, pour les fins de nuit, pour les âmes qui ne dorment jamais vraiment.
Et si l’on tend bien l’oreille, on y entend non pas une voix, mais une présence. Quelqu’un qui nous parle doucement. Quelqu’un qui, peut-être, nous dit ce que l’on n’a jamais osé se dire à soi-même.
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