C’est une gifle reçue en pleine conversation, une phrase lancée par un amant fuyant — « compare & contraster » — qui aurait pu sombrer dans l’oubli. Mais Cleo Handler, elle, a choisi d’en faire un album. Mieux : elle en fait un manifeste intime, tendre et furieusement lucide sur ce moment où l’on cesse d’attendre des autres qu’ils nous sauvent.
compare & contrast est tout sauf un disque de rupture classique. C’est un laboratoire de sensations : du rire nerveux à la solitude un peu honteuse, de l’empowerment soudain au doute poisseux. En treize titres courts et nerveux, Handler dissèque avec une précision pop les mille micro-ruptures qui pavent le chemin vers soi-même.
Dès l’ouverture avec « compare & contrast », le ton est donné : brut, léger en apparence, mais profondément ancré dans une écriture fine, pleine de ces détails qui font mal ou qui sauvent. S’ensuivent des éclairs brillants comme « marathon », course essoufflée vers une authenticité qu’on ne sait plus très bien nommer, ou « funny seeing you here », petite gifle douce-amère contre les coïncidences cruelles.
Dans « suspension of disbelief », Handler explore ce moment où l’on se force encore à croire à une histoire qui s’effiloche, tandis que « galway » et « summer » ouvrent des parenthèses plus tendres, presque contemplatives. « rules » pose la question de la frontière entre compromis et renoncement avec une justesse qui rappelle Liz Phair ou Wet Leg.
Les ballades pop-punk miniatures « think about you » et « bubbles » allient fraîcheur adolescente et désillusion sereine. Tandis que « break into 3 » et « easy » proposent des instants suspendus, comme des Polaroids d’émotions fugitives. Enfin, « maybe you’ve noticed » et « happy baby » bouclent l’album avec une note d’acceptation douce, jamais résignée.
Musicalement, Cleo Handler choisit l’épure : guitares nerveuses, batteries sèches, production maison à Wild Horizon Sound (avec Claire Morison, Wayne Whittaker et Greg Settino), et surtout cette voix claire, un peu fragile mais toujours déterminée, qui rappelle par moments la spontanéité crue d’Olivia Rodrigo, la rage douce de Beach Bunny ou l’élégance désinvolte de Mannequin Pussy.
Visuellement, ses clips réalisés en DIY (pour « compare & contrast », « marathon » et « rules ») épousent cette esthétique lo-fi nostalgique, entre journal intime filmé et rêverie adolescente, avec ce grain d’authenticité qu’aucun filtre Instagram ne pourra jamais simuler.
compare & contrast n’est pas un album pour ceux qui cherchent des réponses faciles. C’est une carte d’émotions brouillées, griffonnée à l’encre invisible de nos contradictions. C’est une main tendue à celles et ceux qui avancent dans la jungle sentimentale sans perdre leur sens de l’humour, ni leur capacité à encore croire en eux-mêmes.
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