Certains morceaux caressent, d’autres qui cognent. Et puis il y a ceux, plus rares, qui prennent feu lentement, comme un brasier sourd sous la cendre — Neverland fait partie de cette catégorie. Le duo allemand Para Lia, toujours aussi peu enclin à céder à la facilité, livre ici un titre qui dévore autant les tympans que les certitudes. Un trip électrique et lucide, qui convoque les esprits du rock contestataire à coups de fuzz rageur et d’élans poétiques.
Dès les premières secondes, le morceau plante son décor : un mur de guitares sinueuses, épaisses comme la brume sur une lande post-apocalyptique, survolé par une voix grave, habitée, presque chamanique. On pense à une collision improbable entre les textures planantes de The War on Drugs, les tensions rampantes de Radiohead époque Hail to the Thief, et le souffle engagé du Grateful Dead dans ses moments les plus éveillés.
Mais derrière les nappes psychédéliques, c’est la clarté du propos qui sidère. Neverland, malgré son titre enfantin, ne parle pas d’évasion mais de résistance. Ici, l’utopie est disséquée, arrachée à ses oripeaux. Il s’agit de dire non à l’endormissement généralisé, à la novlangue politique qui transforme le citoyen en produit, au simulacre d’individualité que l’on sert à coups de storytelling creux.
Para Lia n’a pas peur d’être frontal, mais le fait avec élégance : pas de slogans creux, mais une écriture dense, allusive, où chaque image sonne comme une gifle. Le clip, capté live, enfonce le clou : pas d’artifice, juste un groupe qui joue vraiment, qui vibre, qui donne tout — et surtout qui croit encore à la puissance du rock comme outil de friction.
Alors non, Neverland n’est pas une destination. C’est un miroir. Tendu à nos illusions collectives, à notre passivité, à nos silences complices. Et dans ce miroir, Para Lia nous regarde droit dans les yeux.
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