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Joey Economics et Madhattar frappent fort avec Pissed Off

Joey Economics et Madhattar frappent fort avec Pissed Off
  • Publishedseptembre 15, 2025

Premier contact : un vertige. La prod s’ouvre comme une salle des marchés à l’aube, clignotements rouges, alarmes feutrées, un kick métronomique qui rappelle le pas sec d’un vigile dans un parking vide. Au centre, deux voix qui se jaugent et se griffent — Joey Economics d’un côté, cadence carrée, jargon affûté, MBA dans le holster ; Madhattar de l’autre, tranchant chirurgical, sens de la punchline comme d’autres manient le surin. Ensemble, ils transforment Pissed Off en duel de néons : ça miroite, ça coupe, ça éclaire.

Le morceau s’écoute comme un plan séquence. Les couplets basculent en seesaw, l’un rebondit sur l’autre, les rôles s’inversent à la volée : héros/vilain, start-upper/Robin des Bois, trader du dimanche/poète du chaos. Joey, enfant du 818 devenu consultant Big 4, rappe avec ce calme nerveux des gens qui ont trop vu d’Excel pour croire encore aux miracles, mais assez de nuits blanches pour en convoquer la fièvre. Sa langue assemble cours de macro, slang d’open space et souvenirs de bancs de UCLA ; ses assonances claquent comme des portes battantes de boardroom.

Madhattar, elle, renverse la table. Flow angulaire, diction nette, vision à contre-champ : si Joey cartographie l’idéologie (crypto, bull runs, promesses de “freedom” packagées en tokens), elle en expose les angles morts — l’addiction au rendement, la romance toxique de l’ascension, l’éternelle promiscuité entre “hustle” et extraction. Sa présence n’est pas un simple featuring : c’est le contre-pouvoir, la voix qui sabote les slogans, la conscience qui se rit des “To the moon”.

Production : minimalisme stressé. Basse ramassée, caisse claire sèche, synthé en veille permanente — la texture d’un open-space après minuit. Pas de sucre, pas de pad flatteur : un terrain aride où chaque rime doit survivre par sa densité. Le mix laisse de l’air ; les silences deviennent des sous-entendus, les respirations des regards caméra.

Ce qui fascine, c’est l’équilibre. Pissed Off parle de colère, mais déjoue la posture bravache : on y entend la contradiction constitutive d’une génération qui veut gagner sans se vendre, croire sans se faire avoir. Joey met à nu la tentation du costume (M&A, KPIs, follow Gary Vee), tout en rappelant d’où il vient — freestyle late-night, loyautés de quartier, nécessité de ne pas perdre le fil humain. Madhattar souligne que l’empowerment sans boussole vire vite à la prédation. Ensemble, ils signent un titre “conscient” qui refuse la morale facile et préfère l’ambiguïté comme méthode.

Dans la discographie de Joey Economics, Pissed Off fait figure de manifeste : rap d’exécutant émotif, musclé par l’analyse mais radioactif de vécu, qui prend la finance comme métaphore d’une époque et le couplet comme audit existentiel. Cinématographique, imprévisible, pertinent — un sparring esthétique où l’on sort sonné, pas sermonné.

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Written By
Extravafrench

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