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Music Rock

Exzenya revien sur Captivity : un chant Rock noir où l’enfermement devient miroir

Exzenya revien sur Captivity : un chant Rock noir où l’enfermement devient miroir
  • Publishedoctobre 3, 2025

La première chose que l’on entend dans Captivity, c’est une rengaine arrachée au folklore américain : « Down in the valley, the valley so low ». Mais au lieu d’évoquer la nostalgie des veillées d’autrefois, la voix d’Exzenya la tord en un écho spectral, comme si elle filtrait à travers un vieux poste de radio oublié dans une cellule sans fenêtres. Quelques souffles de vent s’y glissent, et soudain on y est : dans la chambre close, dans l’espace psychologique de l’isolement, là où le temps n’a plus de contour.

Là réside l’audace d’Exzenya : utiliser le langage pop pour dire autre chose que l’amour déçu ou les drames attendus. Captivity n’est pas une ballade de cœur brisé, c’est une plongée glaciale dans la mécanique du contrôle. Chaque ligne vocale, chaque silence, chaque frottement sonore y devient l’équivalent d’une serrure qui claque, d’une clé qui disparaît. Le morceau évolue en mode mineur, lent, presque cérémoniel, comme un rituel de conditionnement où les gestes se répètent jusqu’à abolir l’individu.

Mais si la chanson fascine, c’est d’abord par cette voix qui refuse de se travestir. Exzenya possède une tessiture rare — capable d’aller chercher un grave abyssal (jusqu’au D2) puis de jaillir vers des aigus plaintifs — et elle choisit de l’assumer sans artifices. Pas d’auto-tune, pas de corrections plastifiées : seulement le grain, le souffle, l’imperfection comme force expressive. On sent dans ses graves une pesanteur presque masculine, tenue avec une maîtrise qui coupe le souffle, puis dans ses envolées une fragilité qui fend le ciel. Cet aller-retour constant entre ancrage et déchirure traduit à merveille l’ambivalence du captif : s’abandonner ou résister.

Au-delà de l’esthétique sonore, Captivity s’ancre dans un réalisme psychologique rarement exploré en musique. Exzenya convoque la théorie du trauma, le syndrome de Stockholm, la logique de l’ABA (Applied Behavior Analysis) : autant de concepts qui dépassent le registre métaphorique habituel des “relations toxiques”. Ici, le lien à l’oppresseur n’est pas une image : il est analysé, incarné, chanté. On entend la voix d’une femme qui sait que la liberté peut sembler plus terrifiante que l’enfermement, et qui ose poser les questions que l’on tait : Si je pars, suis-je détruite ? Si je reste, suis-je encore moi ?

L’architecture musicale est volontairement dépouillée, presque ascétique. Quelques percussions, des nappes cinématographiques, une spatialisation pensée comme un décor de film. On pense à Billie Eilish pour le minimalisme anxiogène, à Aurora pour l’élan éthéré, à Fiona Apple pour le refus de lisser les arêtes. Mais Captivity ne copie personne : elle s’inscrit dans une tradition plus vaste, celle des artistes qui transforment la douleur en paysage sonore.

Inséré comme le quatrième chapitre de son album-concept Story of My Life, le morceau agit comme un point de non-retour : l’instant où l’isolement devient total et où l’évasion paraît impensable. C’est une césure, une cicatrice musicale dans la narration. Et au fond, c’est ce qui rend Captivity inoubliable : il ne s’agit pas seulement d’une chanson, mais d’une expérience. Une traversée inconfortable, nécessaire, qui nous force à regarder dans le miroir sombre de ce que le contrôle peut faire à une âme.

Avec ce single, Exzenya s’affirme comme l’une des voix les plus courageuses et atypiques de la scène dark pop. Plus qu’un morceau, Captivity est une mise en abîme : on en sort secoué, mais étrangement lucide, comme si, l’espace de quelques minutes, on avait partagé l’intérieur de la cage.

Pour découvrir plus de nouveautés ROCK, n’hésitez pas à suivre notre Playlist EXTRAVAROCK ci-dessous :

Written By
Extravafrench

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