Il y a dans Afraid cette tension qu’on reconnaît tout de suite : la peur du monde, oui, mais surtout celle de soi. La peur de perdre ce feu créatif, ce vertige adolescent qu’on ressentait quand la musique n’était pas encore un métier, mais un refuge. Cotton Caves signe ici un morceau qui ne cherche pas à plaire — il cherche à toucher, à respirer, à exorciser l’angoisse collective d’une époque suspendue entre anxiété et résilience.
Tout commence par une ligne de guitare presque timide, comme un murmure dans une pièce vide. Puis viennent les percussions, discrètes mais déterminées, qui installent une pulsation humaine, presque cardiaque. On sent que le compositeur derrière Cotton Caves connaît trop bien la grammaire du son — son passé de musicien de film se devine dans chaque respiration du morceau. Rien n’est laissé au hasard : chaque silence, chaque écho, chaque reverb semble pesé pour faire vibrer cette impression d’instabilité douce, comme si la chanson elle-même hésitait à se livrer complètement.
Mais ce qui emporte, c’est la voix. Fragile, tremblée, sincère jusqu’à la faille. Elle ne cherche pas à briller, elle cherche à survivre. On y entend la lassitude d’un monde en dérive, la peur sourde de ne plus reconnaître le ciel au-dessus de soi. Pourtant, malgré la gravité du thème, Afraid n’est jamais lourd. C’est une chanson lumineuse sur la peur, une prière pour continuer à avancer même quand tout semble foutu.
Cotton Caves réinvente ici un certain romantisme indie — celui des grands solitaires, de ceux qui bricolent la beauté avec trois accords et un cœur qui bat trop fort. On pense à Thom Yorke dans ses moments les plus humains, à The National pour la gravité, à Phoenix pour la clarté mélodique. Mais Afraid garde une identité propre, profondément introspective et délicatement cinématographique.
Ce morceau, c’est le retour d’un musicien vers lui-même. Après des années passées à écrire pour les images des autres, Cotton Caves compose enfin la bande-son de ses propres peurs. Et le résultat, c’est une œuvre à la fois intime et universelle, un cri feutré pour ceux qui n’osent plus crier.
Dans un monde saturé de certitudes, Afraid a la décence de douter. Et c’est peut-être pour ça qu’il sonne si juste : parce qu’il nous rappelle que la peur, parfois, c’est aussi une forme de lucidité.
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