Il y a dans Buggin’ Out quelque chose de cette lente respiration du bitume au petit matin, quand les rues sont encore pleines des fantômes de la veille et que la ville hésite entre la rage et la paix. Roy Flush — ou YourEnviousEnemy pour ceux qui le suivent derrière l’écran — fait partie de cette génération d’artistes qui ne compartimentent plus : il vit, pense et rappe à travers plusieurs mondes à la fois. Gamer, producteur, MC et penseur du quotidien numérique, il tisse un pont rare entre les pixels et la poésie, entre la console et le micro.
Son Buggin’ Out se présente d’abord comme un morceau de pure école, presque ascétique. Pas d’artifice, pas de hook mielleux. Juste un beat ciselé, aux accents East Coast traditionnels, et une écriture d’une précision chirurgicale. On y retrouve cette pudeur du hip-hop new-yorkais de la fin des années 90 : les mots claquent sans se presser, les silences respirent comme des battements de cœur, et chaque rime semble posée à la main, comme un artisan qui polit sa pierre. C’est un hommage au “real rap”, mais livré avec la retenue d’un sage qui préfère murmurer plutôt que prouver.
L’atmosphère, doucement feutrée, évoque le quotidien du hood sans le folklore ni la pose : pas de clichés, juste des observations, des sensations — un coin de rue, une fatigue, un rêve encore tenace malgré la routine. Loin de la surenchère habituelle, Roy Flush choisit la voie du minimalisme. Less is more, dit-il. Et c’est vrai : le morceau frappe par sa sobriété. Une ligne de basse chaude, une batterie ronde, quelques samples vaporeux. L’essentiel. Le réel.
Ce qui distingue Roy Flush, c’est sa capacité à rendre le rap méditatif. Derrière le flow, on devine le lecteur, l’observateur, le philosophe de trottoir. Le gars qui, entre deux sessions de jeu et un freestyle, réfléchit à ce que le mot respect veut encore dire à une époque saturée d’écrans. Son univers dépasse la musique : c’est une communauté tranquille qu’il bâtit, un refuge sans drama, où le hip-hop devient un langage commun pour ceux qui cherchent un peu de paix dans le vacarme.
Avec Buggin’ Out, Roy Flush prouve qu’on peut être de Buffalo et parler au monde, qu’on peut aimer le verbe et le virtuel, et que le vrai hip-hop, celui qui respire, observe et pense, n’a jamais cessé d’exister — il a juste changé de serveur.
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