Je me souviens du moment exact où Done m’a happé : cette montée de guitare, à la fois lumineuse et rageuse, comme une porte qu’on défonce à mains nues. Ce n’est pas une chanson qu’on écoute, c’est un point de rupture. Grace de Gier y dépose tout — la colère, la peur, la délivrance — et quand le refrain éclate, on sent presque le goût du métal qu’on a mordu trop longtemps.
Grace écrit comme on respire après l’asphyxie. Done n’est pas un simple single pop-rock, c’est un cri de reconquête, un souffle après des années à se taire. Le morceau, porté par la production précise et organique d’Edgar Grimaldos, avance comme une tempête qui se déploie lentement : d’abord un murmure blessé, puis une déclaration de guerre intérieure. Les guitares saturées tracent un champ de bataille, la batterie martèle le rythme d’une délivrance annoncée, et la voix — cette voix, habitée, fiévreuse — traverse le morceau comme une lame chaude dans la glace.
Ce qui frappe, c’est la sincérité. Pas celle, propre, de la pop calibrée, mais celle, brute, d’une artiste qui a trop vécu pour jouer la comédie. On y sent la rage d’une femme qui s’arrache à l’ombre, qui se reconstruit sur ses ruines et refuse désormais toute compromission. “Done” devient alors plus qu’un titre : un mot-monde, un exorcisme.
Grace de Gier ne chante pas pour séduire, mais pour survivre. Sa musique, taillée dans la roche des émotions, porte encore les cicatrices de ses origines : la passion latine, la mélancolie européenne, et cette tension universelle entre la douceur et la déflagration. Elle sait d’où elle vient — de Bogotá, de l’exil, de la solitude — et elle transforme ce poids en force.
Sous les apparats du rock mélodique, Done cache une architecture émotionnelle d’une rare justesse. Chaque son respire, chaque silence pèse. On entend la main d’un artisan derrière le chaos, celle d’un ingénieur du sentiment : Adam Ayan, maître du mastering, qui polit ici le feu sans jamais l’éteindre.
Mais ce n’est pas la technique qui emporte, c’est le courage. Cette façon qu’a Grace de transformer sa vulnérabilité en pouvoir, sa douleur en pulsation. Done parle à toutes celles et ceux qui ont dû dire stop — à une histoire, à un amour, à une version d’eux-mêmes. Et dans son éclat de guitare finale, on croit entendre le bruit discret d’une chaîne qui tombe.
Ce morceau, c’est la catharsis devenue hymne. Un adieu furieux au passé, mais aussi un début : celui d’une artiste qui, enfin, ne demande plus la permission d’exister.
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