Roxbury, Massachusetts. La ville ne dort jamais, elle grince, elle hurle, elle respire à travers les bouches d’égout. C’est là qu’Isaiah Irahkiev taille son verbe comme on aiguise un couteau. Avec Joyner Lucas, son dernier single, il ne se contente pas d’un hommage : il transforme le respect en carburant, la faim en feu.
Derrière ce titre qui emprunte au beat iconique de Ramen & OJ, il y a une tension palpable, une volonté presque rageuse de prouver que la vérité du rap se joue encore dans les tripes, pas dans les chiffres. Irahkiev ne copie pas Joyner — il converse avec lui. Il entre dans la légende par la porte arrière, celle des mecs qui n’ont rien d’autre que leur voix et un bloc-notes.
Son flow frappe comme un uppercut dans un gymnase vide. Pas d’artifice, pas d’autotune qui caresse les oreilles — juste la voix, nue, éraillée, entêtée. Chaque phrase pèse son poids de vécu. Il y a cette sincérité brute, cette écriture à vif, qui rappelle la grande école du storytelling à la Boston : celle où la rue n’est pas un décor, mais une mémoire.
Le clip, tourné par The Watchers, respire la poussière et la tension. Les plans sont serrés, les ombres découpent le visage du rappeur comme une confession. On sent le souffle court, la caméra collée à la peau, comme si elle craignait de rater le moment où la rage bascule en lumière.
Ce qui impressionne, c’est la discipline. Isaiah Irahkiev, c’est ce rappeur qui ne triche jamais. Son flow est précis, syncopé, presque chirurgical — un entrelacs de syllabes qui se cognent au rythme du cœur. On y sent la même faim que chez Joyner Lucas, mais sans la posture : ici, la gloire n’est pas une promesse, c’est une dette.
Dans un monde où beaucoup rappent pour exister, Isaiah rappe pour respirer. Il ne fait pas du rap conscient, il fait du rap lucide : celui qui regarde la misère sans la romantiser, celui qui fait de la douleur un moteur et de l’authenticité une arme.
Joyner Lucas n’est pas juste un freestyle. C’est une prise de position. Une déclaration d’indépendance. Irahkiev s’y affirme comme un narrateur du réel, un artisan du mot juste, un héritier de cette lignée d’outsiders qui préfèrent le respect du mic à la lumière des écrans.
Et quand la dernière mesure s’éteint, il ne reste qu’une impression : celle d’avoir croisé un rappeur en marche, un homme qui ne court pas après son idole, mais court à côté d’elle, à sa vitesse, sur son propre bitume.
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