Un souffle mythologique traverse cet album comme un vent venu du Nord : entre la mort et la renaissance, la douleur et la lumière, Bastion’s Wake tisse un métal symphonique à la fois brut, spirituel et infiniment humain.
Né de l’imaginaire fertile du duo Sami et Ray, rejoints depuis par Rob Westbrook et Ben, Go Tell the Bees s’impose comme une fresque métallo-cinématique à part. Inspiré par la tradition païenne de “parler aux abeilles” — leur annoncer les naissances, les deuils, les amours —, l’album devient ici un rituel sonore : une façon d’apprivoiser la perte et de célébrer la vie.
Le voyage commence par “Motanka”, courte ouverture instrumentale, presque chamanique, où les guitares montent comme un brouillard. Une minute de recueillement avant la tempête. Elle s’abat avec “Willow’s Ruse”, pièce maîtresse du disque : un choc de puissance et de mélancolie, où la voix aérienne de Sami fend la densité instrumentale comme une prière en pleine bataille. C’est là que Bastion’s Wake trouve son équilibre parfait entre la tendresse et le chaos.
Vient ensuite “(Don’t) Tell the Bees”, incantation au double visage : à la fois chant funèbre et acte de résistance. La guitare de Ray y tisse des arabesques tranchantes tandis que la section rythmique pulse comme un cœur endeuillé. “Tiny Box” poursuit dans un registre plus introspectif — un morceau suspendu entre doom et folk, presque cinématographique, où chaque note semble peser son poids d’âme.
Sur “This is Home”, le groupe offre une respiration lumineuse, un hymne à l’ancrage au milieu du deuil. La production d’Øystein G. Brun (Borknagar) magnifie la dimension symphonique du titre : on y sent la Norvège dans chaque réverbération, chaque écho. “Pathos”, quant à lui, s’enfonce dans un clair-obscur plus viscéral — les guitares grondent, les voix s’élèvent, et l’on touche du doigt cette douleur universelle qui précède la guérison.
Le sommet de l’album se joue avec “Lighthouse” : un phare dans la tempête, un morceau qui monte lentement en intensité avant d’exploser dans un final libérateur. Puis “Run Away” ramène la tension, une fuite vers soi-même, taillée dans l’urgence et la nostalgie. “Nimue”, plus mystique, convoque l’imaginaire arthurien : les harmonies s’y déploient comme des incantations dans la brume. Enfin, “Sunflower” ferme le cycle sur une note d’espoir — un dernier regard vers la lumière, celle qui persiste après la perte.
Tout dans Go Tell the Bees respire la sincérité et la métamorphose. La voix de Sami, aussi limpide qu’une flamme dans la nuit, porte des textes qui touchent au sacré ; la guitare de Ray cisaille l’air comme une lame forgée à la main. L’ensemble, mixé et masterisé par Brun en Norvège, déploie un son massif, à la fois moderne et hanté.
Cet album est une cérémonie, un espace où la colère et la douceur cohabitent, où le chagrin devient énergie. Go Tell the Bees rappelle que dans chaque perte, il y a un chant — et dans chaque silence, un bourdonnement de vie.
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