« On dirait que quelqu’un a branché une âme mourante sur une prise électrique, et que ses derniers battements tentent encore de dire la vérité. Deux phrases suffisent pour comprendre : Running on Wires n’est pas un album, c’est une fuite à travers un futur fracturé, une lucidité électrique qui refuse d’abandonner la chair aux circuits.»
Il y a, dans ce projet signé Vampire Liver Therapy, cette solitude légendaire des créateurs qui bricolent l’effondrement comme d’autres bricolent des hymnes pop. Sauf qu’ici, tout respire la nuit : une nuit clinique, câblée, où Santiago devient le point d’entrée d’une dystopie intime, nourrie de Bowie période Outside, de la rage industrielle de NIN, des lueurs maladives d’un Manson spectral, et d’une dérive lynchienne où chaque texture semble contaminée par une émotion oubliée.
L’album s’ouvre avec Kill Configurator, une pièce qui pulse comme un cœur encore attaché à une machine de survie. C’est agressif sans hystérie, tendu comme un fil électrique près de rompre, saturé de glitchs qui ressemblent à des souvenirs qu’on débranche volontairement.
Primitive as the Void poursuit l’excavation : une matière sombre, presque terrestre, mais filtrée par un câble optique. On a la sensation de toucher un sol qui n’existe plus, un terrain émotionnel fossilisé.
Puis vient le titre central, Running on Wires, véritable axe du disque. Ici, Vampire Liver Therapy condense tout : la fragilité numérique, le souffle coupé, l’humanité réduite à une suite d’erreurs syntaxiques. Le morceau avance comme une prière faite à un serveur qui expire. C’est beau, triste, vibrant, et étrangement apaisant.
Nowhere Fast accélère le désastre : un morceau qui court tout droit dans le mur, mais le fait avec grâce. Une montée d’adrénaline mélodique, presque pop, mais rongée par un spleen technologique.
Animal Emotions renoue avec l’organique, mais comme si les émotions étaient passées sous un microscope. Ça tremble, ça frotte, ça respire mal. Le morceau semble enfermé dans un bocal.
Memories Fade porte bien son nom : une lente érosion, une corrosion du souvenir. On y entend tout ce que la mémoire humaine perd en premier : le froid, les voix, les couleurs.
I Feel for Your Infection glisse vers la contamination : un morceau corrosif, suintant, presque sensuel dans sa noirceur. Comme un baiser donné à une machine pleine de bugs.
Lingers Like a Ghost : probablement le titre le plus spectral. Les nappes y flottent comme des traces d’humains disparus. C’est un requiem minimaliste, une respiration qui refuse de s’éteindre.
Different Animals renoue avec l’énergie, mais une énergie déformée, étrangère, comme si l’humanité mutait lentement. Une pulsation animale mais enveloppée de chrome.
Enfin, Stupid Soul in Hell termine le voyage : amer, lucide, presque douloureux. Une confession murmurée à travers un ventilateur industriel, une épiphanie électrique. Le titre porte tout l’album en lui : une âme qui cherche un endroit où s’accrocher dans un monde qui ne veut plus de chaleur.
Running on Wires est un album de solitude numérique, mais d’une humanité éclatante.
Un manifeste artisanal, radical, produit dans l’ombre d’une chambre mais destiné à éclairer des mondes entiers.
Un disque qui prouve que la fin de l’humanité ne commencera pas par les machines :
elle commence toujours par nos souvenirs.
Instagram : vampirelivertherapy
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