« Chaque titre de cet EP est une pièce arrachée au réel, un fragment brûlant qui prouve que la vulnérabilité peut encore faire trembler les murs. »
Il y a chez Ceyeo cette manière d’avancer comme un funambule sur un fil saturé d’émotions, une façon de transformer l’effondrement intérieur en architecture musicale. Together They Were Nothing n’est pas un simple EP : c’est une autopsie sentimentale, un geste lucide, un miroir tendu sans maquillage. Sept titres, sept fissures, sept vérités qu’on préfère souvent ne pas regarder en face.
Confession ouvre le bal comme une plaie encore chaude. Ceyeo y sème un aveu qu’on refuse de formuler, cette peur d’aimer trop, ou pas assez, ou mal — on ne sait jamais vraiment. Sa voix tremble mais avance, portée par un piano qui semble hésiter à chaque mesure, comme si le morceau cherchait lui-même comment survivre à ce qu’il raconte. C’est court, tranchant, presque trop honnête pour respirer.
Dans I Can Tell, les cordes de Maga Clavijo viennent froncer le paysage musical. Le morceau se déploie comme une capsule d’intuition — ce moment où l’on comprend avant même d’entendre. Ceyeo y cisèle un climat inquiet, presque télépathique, où chaque instrument semble deviner la suite avant l’auditeur. C’est une dramaturgie en tension permanente.
Love Is Angry fait basculer l’EP dans un territoire quasi mythologique. Le morceau s’enflamme autour d’un constat brutal : l’amour n’est pas doux, il frappe, il réclame, il blesse comme un orage qui ne s’excuse pas. On y entend Neruda en écho, on y sent l’orage sous la peau, on y croit à une poésie qui sait encore mordre.
Bedlam est peut-être la pièce la plus politique. Ceyeo y décrit une humanité qui boite, un monde qui s’effondre dans un sabbat de contradictions. Le texte griffe, interroge, refuse les réponses faciles. On traverse des couloirs mentaux où Van Gogh, Kipling et les fantômes de nos propres décisions se croisent sans prévenir.
Avec Contact, Ceyeo désamorce le tumulte pour plonger dans une sorte de trance introspective. Le morceau ressemble à un rituel nocturne, un passage initiatique. On y traverse la mémoire comme on traverse un brouillard dense, chaque image qui revient agit comme un battement de cœur qui refuse d’être oublié. C’est un morceau qui marche droit au centre du vertige.
Colossus poursuit cette plongée intime : un face-à-face avec l’absence, avec ce qu’on perd sans jamais le dire, avec ce qui nous poursuit dans les angles morts. Ceyeo y cherche un paradis introuvable et finit par comprendre que le vrai terrain sacré est celui où l’on accepte enfin de ne plus savoir.
Enfin, This Is How You Win clôt l’EP comme un coup de poing froid, un pamphlet contre le cynisme du monde moderne. C’est mécanique, tranchant, implacable — on dirait presque un manuel de survie dicté par une voix fatiguée d’espérer. Ceyeo y désosse la logique du pouvoir et laisse l’auditeur face à une question terrifiante : gagner, oui, mais contre quoi, et à quel prix ?
Together They Were Nothing est un portrait du chaos intérieur, une œuvre qui refuse les illusions, qui touche là où on détourne le regard. Un disque qui ne cherche pas à plaire, mais à dire — et qui, dans cette sincérité radicale, devient indispensable.
Pour découvrir plus de nouveautés ROCK, n’hésitez pas à suivre notre Playlist EXTRAVAROCK ci-dessous :
