« Autour de cette frontière mouvante qu’il trace seul, The7thGatekeeper transforme le poids du monde en éclats sonores, brutaux, tendres, contradictoires — mais vivants. »
Around This Edge Together ressemble moins à un album qu’à un journal extirpé d’une tempête intérieure, griffé de riffs, de silences, de colères rentrées, de rêves qui sentent la sueur froide. Le musicien gallois — seul dans son chaos cupboard, à Barry — fait ici jaillir un rock hybride où la lourdeur de Slipknot, l’obsession rythmique de Tool et les confidences d’un songwriter folk s’imbriquent dans une même respiration. Ce disque est un territoire mouvant : abrasif, fragile, hanté, mais terriblement humain.
L’ouverture, Not to Be Taken, est une déflagration brève, presque un avertissement. Les guitares claquent comme des dents serrées, et l’on comprend immédiatement que rien ne sera lissé, que l’on va traverser un espace où l’artiste ne joue pas à paraître : il s’expose. 5588 poursuit dans une veine plus mécanique, presque industrielle, avec une pulsation qui semble imiter celle d’un homme qui avance malgré les coups, malgré le réel qui cogne.
Puis surgit Amulet, morceau court mais essentiel : une respiration électrique, comme un gri-gri sonore que l’on serre dans la paume pour tenir la journée debout. The Hoard, lui, ouvre une béance plus sombre. On y entend l’accumulation — d’angoisses, de souvenirs, de mondes intérieurs qui s’effritent. C’est lourd, mais jamais écrasant : The7thGatekeeper sait laisser filtrer la lumière.
Avec Baryon II, il change d’échelle. On quitte l’intime pour une sensation presque cosmique. Le morceau est bref, mais il évoque une matière en mutation, un scintillement où l’expérimental se fait narratif. Wrapped arrive alors comme un morceau charnière : mélodie plus sinueuse, tension plus émotionnelle, un repli sur soi où l’artiste semble tenter d’enrouler ses propres démons avant qu’ils n’explosent.
Vient ensuite Inamorata, moment de grâce inattendu. Dédiée à sa femme, cette miniature d’amour tendre tranche avec la rudesse du reste. C’est une confession murmurée, une accalmie fragile, comme si la musique se souvenait soudain qu’elle peut aussi panser. The Garden renoue avec une énergie plus frontale, mais y glisse une mélancolie discrète : un jardin où rien ne pousse sans heurts, où l’on arrache les mauvaises herbes de soi-même.
Et puis tout converge vers le pivot du disque : (Fear) Wet State. Inspiré d’un rêve terrifiant, le morceau condense toutes les obsessions du projet — la peur, la matière sonore qui tourbillonne, une urgence presque viscérale. On y entend la progression d’un artiste qui transforme ses cauchemars en architecture musicale, et qui, dans ce chaos parfaitement contrôlé, trouve une forme de vérité brute.
Around This Edge Together impressionne par sa cohérence malgré sa diversité. Chaque morceau est un fragment d’un même éclat, une facette d’un esprit qui refuse de s’aseptiser. Dans ce second album, The7thGatekeeper avance, un pas après l’autre, sur sa propre arête — celle où l’on vacille, mais où l’on voit plus loin que de l’autre côté.
Un disque rugueux, intranquille, profondément honnête. Une frontière qu’on traverse ensemble.
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