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Bastien Pons nous plonge en plein « Black Clouds » avec Frank Zozky

Bastien Pons nous plonge en plein « Black Clouds » avec Frank Zozky
  • Publishednovembre 30, 2025

« Black Clouds est un territoire à part, une chambre d’échos où Bastien Pons transforme l’invisible en matière respirante. »

Les œuvres qui s’installent en vous comme une présence familière et pourtant dérangeante ne préviennent jamais. Black Clouds, dans la constellation granuleuse de Bastien Pons, agit précisément ainsi : une immersion lente, progressive, presque organique, où chaque texture semble observer l’auditeur autant que celui-ci l’écoute. Dès les premières secondes, on sent que quelque chose cherche à prendre forme — non pas une mélodie, mais une sensation. Une densité. Une tension prête à se fissurer.

Pons ne construit pas un morceau ; il sculpte un climat. La voix répétitive, volontairement dépouillée, ressemble à une silhouette que l’on aperçoit derrière un verre dépoli. On devine une présence, jamais son contour. Frank Zozky, lui, apparaît comme une ombre additionnelle, un souffle parallèle qui n’offre aucune réponse, seulement un autre angle de la même inquiétude. La collaboration ressemble moins à un duo qu’à deux consciences qui cohabitent silencieusement dans une pièce mal éclairée.

Le morceau repose sur une dramaturgie de frottements : la matière bruitiste, les drones voilés, les boucles fissurées, les fragments vocaux comme arrachés d’un sommeil lourd. À mesure que tout s’épaissit, Black Clouds devient une sorte de couloir psychique, un passage où les textures se dilatent, se déforment, se répondent sans jamais converger vers une résolution. L’équilibre repose sur une tension à la fois fragile et implacable, comme un souffle qu’on retient trop longtemps.

Ce qui impressionne surtout, c’est la manière dont Pons parvient à faire exister le silence à l’intérieur même du bruit. Les basses vibrent, les drones grondent, les distorsions rampent — mais toujours en laissant, quelque part, un interstice. Un vide respirable. Un espace mental. Cette maîtrise du négatif rappelle la photographie argentique qu’il pratique : l’image n’est jamais donnée d’un bloc, elle se révèle par degrés, dans un clair-obscur mouvant qui oblige le regard à se réadapter.

À travers Black Clouds, Pons propose un mode d’écoute différent de celui dicté par la logique des playlists. Ici, aucune gratification immédiate, aucun crescendo prévisible, aucun point d’appui rassurant. Le morceau exige de se laisser absorber, d’abandonner la distance critique pour entrer dans une forme d’expérience sensorielle — presque méditative, presque clinique, mais toujours profondément humaine. Cette ambivalence, ce mélange de vulnérabilité et d’abstraction, constitue la signature de l’artiste.

La réussite du titre tient à son étrange capacité à suspendre le temps. Rien ne se passe, et pourtant tout s’accumule. Rien n’éclate, mais l’intensité monte. Rien ne se dit, mais le malaise communique. Black Clouds se vit comme un état, une condition atmosphérique intérieure, un nuage qui ne libère jamais sa pluie mais continue de charger l’air d’électricité.

Dans le paysage expérimental actuel, Bastien Pons ne cherche pas la provocation ni l’avant-gardisme spectaculaire : il cherche la vérité du son dans sa fragilité même. Black Clouds n’est pas un titre à écouter distraitement — c’est un lieu où l’on entre, puis que l’on quitte changé, comme après avoir observé trop longtemps quelque chose qu’on ne saurait expliquer.

Pour découvrir plus de nouveautés du moment, n’hésitez pas à suivre notre Playlist EXTRAVANOW ci-dessous :

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Extravafrench

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