“Hot Honey s’insinue lentement, comme une douceur trouble qui devient obsession avant même qu’on ait compris pourquoi.”
Dès les premières secondes, quelque chose accroche. Pas une explosion, pas un effet tape-à-l’œil, mais une tension fine, presque sournoise, qui s’installe dans le creux de l’oreille. Hot Honey avance à pas feutrés, avec cette assurance discrète propre aux morceaux qui savent exactement où ils vont sans jamais lever la voix. high jump joue ici un jeu subtil : séduire sans flatter, intriguer sans expliquer, laisser l’auditeur combler lui-même les silences.
Le morceau repose sur une matière lo-fi volontairement rugueuse. Les guitares grincent légèrement, comme si elles avaient été enregistrées à la lumière d’une ampoule fatiguée, et la batterie, compacte, presque étouffée, impose un groove qui ne cherche pas la démonstration. Ce minimalisme n’a rien d’un exercice de style : il sert une narration diffuse, une sensation de malaise doux, une forme de sensualité un peu bancale qui fait toute la singularité du titre.
Ce qui frappe, c’est la manière dont la voix vient perturber cet équilibre. Elle pique, elle provoque, elle ne cherche pas à caresser. Il y a quelque chose de frontal dans la façon dont les mots sont posés, comme une confidence lancée sans filtre, sans vérification préalable. Cette tension entre une instrumentation retenue et un chant presque insolent crée un frottement permanent, un inconfort délicieux qui empêche le morceau de se dissoudre dans la simple vibe.
On sent chez high jump une filiation évidente avec certaines esthétiques contemporaines, entre les aspérités émotionnelles de MkGee, les détours expérimentaux de ML Buch et cette nonchalance faussement lisse que l’on associe à Men I Trust. Mais Hot Honey n’est jamais une synthèse paresseuse. Le groupe semble plutôt s’amuser à déséquilibrer ces références, à leur retirer toute politesse excessive pour en garder la nervosité.
La construction du morceau mérite qu’on s’y attarde. Rien n’est précipité. high jump prend le temps d’installer son décor, puis de le fissurer lentement. Quand arrive le passage charnière, cette montée vers le pont et le second refrain, le morceau change subtilement de densité. Ce n’est pas un climax spectaculaire, mais une bascule intérieure : quelque chose se resserre, le groove gagne en insistance, et l’on réalise que l’on est déjà pris au piège.
Hot Honey agit comme ces chansons que l’on croit saisir immédiatement, avant de comprendre qu’elles continuent de travailler en sourd. Un titre qui ne cherche pas à séduire les playlists par excès de douceur, mais par une identité claire, assumée, presque abrasive par moments. Dans un paysage indie souvent trop lisse, high jump choisit la texture, l’ambiguïté, le grain.
Un morceau qui colle, qui persiste, qui revient sans prévenir. Et surtout, un signal fort : celui d’un groupe qui préfère laisser des marques plutôt que de simplement remplir l’espace.
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