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La diaspora danse avec ses fantômes avec ShAIkh sur « O Laurindinha »

La diaspora danse avec ses fantômes avec ShAIkh sur « O Laurindinha »
  • Publisheddécembre 18, 2025

« Transformer l’héritage en mouvement, sans jamais le figer dans la nostalgie. »

Il y a des morceaux qui n’entrent pas par les oreilles mais par la peau. O Laurindinha fait partie de ceux-là. Dès les premières pulsations, quelque chose d’ancien se remet à respirer, comme un souvenir que l’on croyait immobile et qui, soudain, recommence à marcher. ShAIkh Kev ne signe pas ici un simple titre afrofusion de plus : il ouvre une brèche temporelle, un dialogue intime entre la voix des ancêtres et les machines du présent.

Le morceau repose sur un geste artistique fort : ne pas sacraliser la tradition, mais la laisser muter. O Laurindinha, chanson populaire portugaise transmise de génération en génération, devient sous ses doigts une matière vivante. Les paroles conservent leur douceur naïve, leur poésie circulaire, tandis que la rythmique s’enracine dans des log drums profonds, presque telluriques, hérités de l’amapiano et de l’afro-house. Ce frottement entre la rondeur folklorique et la précision électronique crée une tension fascinante, jamais décorative.

Ce qui frappe, c’est la retenue. ShAIkh Kev ne cherche pas l’explosion club immédiate. Il préfère la transe lente, celle qui s’installe insidieusement, qui fait danser autant la mémoire que le corps. La production respire, laisse des espaces, respecte le silence comme un élément narratif. Chaque couche sonore semble posée avec une intention presque affective, comme si le producteur dialoguait avec la voix de sa mère, avec l’île de Madère, avec tout ce qui a été transmis sans forcément être vécu.

Dans ce titre, la diaspora n’est pas une posture marketing mais une expérience sensorielle. On entend la distance, l’exil doux-amer, la façon dont les cultures se transforment quand elles traversent les continents. O Laurindinha ne regarde pas en arrière avec mélancolie : il regarde droit devant, en acceptant que l’identité soit un mouvement perpétuel. La tradition n’est pas un musée, elle est une piste de danse.

Ce morceau s’inscrit dans un projet plus large, Raízes Reimaginadas, où chaque relecture devient un acte politique discret : redonner aux chants populaires une place dans le présent globalisé, sans les lisser, sans les folkloriser. ShAIkh Kev réussit ce tour de force rare : faire dialoguer l’intime et le collectif, le sacré et le profane, la maison familiale et la nuit électronique.

O Laurindinha est un morceau-pont. Entre générations. Entre géographies. Entre ce que l’on hérite et ce que l’on choisit de devenir. Une musique qui ne cherche pas à expliquer, mais à faire ressentir — et qui rappelle que danser peut aussi être une forme de mémoire active.

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Written By
Extravafrench

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