J’enfile un masque imaginaire avant d’appuyer sur play : ici, l’amour se célèbre en zone rouge, et la tendresse apprend à respirer dans un nuage de fumée. Gas Mask Wedding n’empile pas des genres, il les frictionne jusqu’à l’étincelle — alt-rock, trap, pop-punk, ballade piano — pour raconter des romances qui coupent, qui recousent, qui laissent des marques et de la lumière.
La collision inaugure tout : Car Crash est un piano-voix à nu, enregistré “au souffle”, où chaque résonance de marteau devient souvenir. Pas d’esbroufe, juste l’onde de choc. Puis Scrapbook (avec The Skinner Brothers) colle des bouts de vies comme on assemble un carnet au scotch : batterie sèche, guitares britanniques, mélodies qui font tenir le chaos. À contre-courant, Fucked Up Feelings fusionne RnB et grunge : 808 bodybuildée, guitares détunées, saturation velours — l’intime vibre en low-fi de velours sombre.
La gifle pop-punk arrive avec Left on Read (Love Ghost x Wiplash). Tempo brûlant, caisse claire claquante, refrains fédérateurs : le ghosting devient hymne cathartique, taillé pour la scène. Hair Dye sert d’interlude narratif, comme un Polaroid parlé qui recadre l’histoire. Scar Tissue plonge, elle, dans une trap ténébreuse : sub qui tremble au plexus, hi-hats glacés, voix mitraillée d’échos — la psyché parle en stroboscope.
Retour soleil couchant : Sandcastles (avec Zach Goode) marie le sel californien et un spleen pop-punk, chanson à embrasser trop fort avant que la vague ne l’emporte. Hallucinations (avec Reverie) cruise cap à l’ouest : guitares en apesanteur, basse qui marche, nonchalance psyché entre héritage Sublime et modernité à la Jean Dawson. Minimaliste et désarmante, Angelic suspend le temps : silences éloquents, grain fragile, cicatrice belle.
Troisième passe avec The Skinner Brothers sur Worth It : couplets en clair-obscur, montée progressive, solo de guitare qui tranche comme une décision salvatrice. Spirit Box joue littéralement avec l’au-delà : statiques radio, reverbs inversées, voix comme captée derrière le voile — jolie réussite de sound design au service du thème. A Message from Finn fait office de note d’intention, confiant la genèse et l’obstination derrière le disque.
Le versant 90’s gronde sur Falling Down : guitares fuzz, dynamique “quiet/loud”, basse élastique — une descente qui s’écoute les phares allumés. Heartbreak City (avec Demario SB et Matt Kali) déroule un triptyque voix/mélodie/rap où la métropole devient désert affectif, beat trap brillant sous un refrain entêtant. Avec Soviet Ghost (prod. Seth Bishop), le groupe convoque l’imaginaire industriel : percussions martiales, synthés au froid métallique, progression en mineur qui raconte l’Histoire en frisson. Clôture en clair-obscur : The Masochist bat sur une rythmique hypnotique, cordes synthétiques qui serrent l’étau, chant qui assume la dépendance pour mieux l’exorciser.
Au fil de ces pistes, Love Ghost réussit un paradoxe précieux : raconter l’intime sans mièvrerie, l’époque sans slogans. L’album tient du rituel — on entre abîmé, on ressort cabossé mais vivant, avec l’impression d’avoir trouvé un pouls commun dans le vacarme. Mariage en atmosphère toxique, peut-être ; mais bande-son hautement respirable.
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